Gilbert Bérubé, natif de Val-Brillant, est amoureux du lac Matapédia d’aussi loin qu’il se souvienne. Ce lac d’une profondeur d’environ 40 mètres et d’une longueur de près de 20 km, il le côtoie depuis son enfance. Il a travaillé en arpentage jusqu’à sa retraite. Lorsqu’il me parle du lac, ses yeux bleus s’illuminent ! Je le laisse nous raconter :
« J’ai toujours eu un fort sentiment d’appartenance au lac. Depuis l’âge de 4 ans, j’allais à la pêche avec mon père. C’était mon terrain de jeu d’exploration. Comme un Robinson Crusoé, avec des amis, j’allais découvrir les îles et leurs mystères. Quand tu sais lire le lac et le ciel, tu peux prévenir l’arrivée d’une tempête.
J’ai déjà vu avec des amis des éclosions d’éphémères qui montaient à la surface, des centaines de truites et autres poissons venaient sauter pour s’alimenter. Ça durait 15 minutes, c’était tout un spectacle ! Je me souviens des soirées mémorables, rentrant à la pleine lune et admirant les lumières du village.
Ce lac m’a toujours fasciné. J’aimerais en explorer le fond, tout comme Tintin avec un sous-marin. J’ai souvent imaginé faire disparaître l’eau temporairement pour voir les poissons et les épaves de bateaux de pêcheurs qui ont coulé.
Voici un brin d’historique : je sais qu’il y a eu de la drave. Ils bûchaient sur la côte nord et transportaient le bois à Val-Brillant. Il y a eu une industrie de prélèvement de glace aussi. Sur les trains, ils transportaient des gros cubes vers la ville. La Cédrière (maintenant salle communautaire) servait d’écurie pour les voyageurs/travailleurs avec chevaux. L’hôtel était juste en face.
C’est difficile d’avoir un sentiment d’appartenance si on n’est jamais allé se promener ou pêcher sur le lac. J’aime inviter du monde avec ma grosse chaloupe pour partager ce sentiment-là. Les gens en reviennent euphoriques.
Comme parrain avec les Grands amis, j’ai initié des jeunes à la pêche ; rendus adultes, ils me parlent encore des premières truites qu’ils ont prises avec moi. Ça les a marqués.
Le lac va nous survivre bien entendu mais pour les générations à court terme, je rêve d’avoir un ponton pour y amener des familles en promenade, ça s’imprègne dans nos cellules. Je vous souhaite d’avoir l’occasion, en été, sur le lac calme, au coucher de soleil, de sentir tous les arômes des herbes et des conifères qui descendent avec la fraîcheur de la montagne. Avec l’âge, je deviens plus sage, je prends le temps de dire merci pour toutes ces beautés. Mon souhait le plus cher est que l’eau soit toujours vivable pour les poissons, les oiseaux et tout ce qui vit. Passer une journée sur le lac, ce n’est jamais assez long, même aujourd’hui ».
Rédaction : Louise Beaupré, OBVMR